La danse et Loïe Fuller  

Berthille Lorillou
Publié le 5 Juin 2025
La danse et Loïe Fuller  

Canons de la danse au début du XIXe siècle 

Le début du XIXe siècle est marqué par le ballet et l’Opéra. Jean Béraud et Edgar Degas en représentent les coulisses.  

Cette mode s’accompagne de la création de l’Opéra Garnier pendant les travaux Haussmanniens entre 1860 et 1875.  

Les conditions physiques à avoir, la morphologie et le rythme à tenir sont très strictes pour être une danseuse d’Opéra. À la fin du XIXe siècle, des figures chorégraphiques novatrices comme Loïe Fuller apparaissent.  

Loïe Fuller dans Papillon, Photographie, 1901, Washington, Library of Congress 

Bouleversement d’un art, Loïe Fuller  

Marie Louise Fuller dite Loïe Fuller (1862-1928), danseuse et chorégraphe américaine révolutionne l’industrie de la danse. Elle crée sa “Danse serpentine” en 1892 à New York qu’elle fait breveter en France moyennant de nombreux efforts. Elle fait aussi breveter ses innovations scénographiques et techniques. Loïe Fuller effectue la majeure partie de sa carrière à Paris et se produit régulièrement aux Folies-Bergère après avoir passé sa jeunesse aux États-Unis dans l’Illinois et découvert la danse en Jupe à Londres.  

Cette artiste bouleverse les codes en s’affirmant en tant que femme dans un milieu industriel, commercial et chimique, mais également en officialisant sa relation lesbienne avec Gab Sorère (1870-1961).  

Jean de Paleologu (Pal), Affiche du spectacle de Loïe Fuller aux Folies-Bergère, lithographie, fin du XIXe siècle, collection privée  

Une mise en scène qui interpelle  

Elle élabore ses costumes grâce à une robe de soie blanche et des tiges de bois en continuité de ses bras. Elle libère la danseuse du tutu traditionnel et des chaussons inconfortables du ballet. Elle crée des chorégraphies et des effets de lumières projetées sur son costume pour le faire vivre davantage. Elle noue des liens d’amitié avec des personnalités artistiques, scientifiques et aristocratiques fortes tel Auguste Rodin, les frères Lumière, Marie Curie ou encore Marie de Roumanie. L’artiste collabore notamment avec Marie Curie pour sa “Danse ultra violette” ou “Danse du radium”. Sa principale inspiration est la nature qu’il s’agisse de la faune avec son “Papillon” ou de la flore avec sa “Danse du Lys”.  

Le point culminant de sa carrière est l’Exposition universelle de 1900 dans laquelle elle devient la "Fée Électricité”. C’est à ce moment-là que la danseuse crée son propre théâtre puis fonde sa propre école de danse.  

Loïe Fuller laisse derrière elle des témoignages filmés comme Le Lys de la Vie, film qu’elle a réalisé avec sa compagne.  

Elle est aussi fréquemment représentée dans les arts plastiques, et même sculptée sur les caryatides du balcon à Paris. La quantité de statuettes, posters, lampes à son effigie témoignent de sa popularité et son statut d’icône parisienne.  

François-Raoul Larche, La Danseuse Loïe Fuller, bronze doré, 46 cm, 1901, New York Museum of Modern Art 

Pierre Roche, Loïe Fuller, pierre, v.1900, Paris, 3e arrondissement, balcon de l’immeuble du 39 rue Réaumur 

Pierre Roche, Loïe Fuller, 1900, médaillon uniface en plâtre, 1,7 x 19,3 cm, Paris, musée d’Orsay 

Ces objets ainsi que les films et photographies permettent de garder une trace de l’artiste et de son oeuvre. De nouveaux artistes peuvent alors s’en inspirer. On peut penser à Georgia O'keeffe et ses représentations de flore.  

Georgia O’Keeffe, Red Canna, 1924 

Les Ballets Fantastiques de La Loïe 

La Loïe créée son école de danse en 1908 nommée “Ballets Fantastiques”. Cette “école” qui n’est pas une institution au sens stricte accueille des jeunes filles âgées de 6 à 15 ans (éducation des jeunes filles jusqu’aux années 1950 par Gabrielle Bloch “Gab Sorère”). Ne connaissant pas l’identité des jeunes filles y étudiant, on ne peut pas retracer l’influence exacte de cette école. Seul des photographies représentant les jeunes filles danser ou poser témoignent d’elles. De plus, Loïe Fuller prêtait une grande attention à garder ses méthodes de productions et ses pas de danse secrets, même dans ses propres films. Un des seuls noms que nous avons est Isadora Duncan.  

Harry C. Ellis (1857-1925), Miss Loïe Fuller et son école de danse, 1914, épreuve argentique, 11,6 x 17,1 cm, Paris, Musée d’Orsay  

Harry C. Ellis, Les Elèves de Loïe Fuller dansant dans un parc, 1914, Aristotype (épreuve au citrate), 17,5 x 23,2 cm, Paris musée d’Orsay 

Isadora Duncan (26 mai 1877-1927) est une des danseuses les plus célèbres du XXe siècle. Elle fut l’élève de Loïe Fuller, dans une de ses troupes de la tournée de 1902. Isadora pris ensuite son indépendance artistique. Elle développe une sorte d’archéologie de la danse antique à l’aide de céramiques gréco-romaines. Loïe Fuller et Isadora Duncan, malgré leurs différents restent mutuellement admiratives de leurs travaux.  La jeune femme s’inscrit dans la lignée de son aînée par son aspect novateur et ses costumes de draps blancs, même si les costumes d’Isadora avaient la vocation de restituer les vêtements portés dans la Grèce antique. De même, les deux femmes ont été photographiées dansant devant des monuments emblématiques.  

Harry C.Ellis, Loïe Fuller avec son voile dansant devant le sphinx, 1914, épreuve argentique, 23 x 16,4 cm, Paris, musée d’Orsay 

Edward Jean Steichen, Isadora Duncan à l’Erechtéion d’Athènes, photographie, v.1921, Toledo (Ohio), Musem of Art  

Edward Jean Steichen, Isadora Duncan au Théâtre de Dionysos, Photographie, v.1921, Toledo (Ohio), Museum of Art 

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