Hommage à Egon Schiele - 135 ans le 12 juin  

Berthille Lorillou
Publié le 22 Juin 2025
Hommage à Egon Schiele - 135 ans le 12 juin  

Egon Schiele naît le 12 juin 1890 à proximité de Vienne, à Tulln an der Donau. C'est un artiste dont la critique actuelle s’empare régulièrement. Tiraillant entre défense et blâme. Les commentaires à son sujet ne font que resasser le tumulte de son arrestation au printemps 1912. En effet, l’artiste est accusé d’enlèvement, de viol sur mineure et immoralité publique. Il passa 24 jours en prison et plus d’une centaine de ses dessins de nus furent saisis dont un brûlé au tribunal.  

Egon Schiele, Autoportrait à l’épaule nue relevée, 1912, Vienne, Musée Leopold
Egon Schiele, Autoportrait à l’épaule nue relevée, 1912, Vienne, Musée Leopold

Scandale à Vienne 

Ce qui a mené l’artiste devant la justice est un point de rupture. Le train de vie peu conventionnel d’Egon dérange déjà la bonne société. Sa vie en concubinage avec Wally Neuzil, en dehors des liens du mariage, indisposait les habitants des localités où il s’installait. De plus, le style et les sujets dénudés représentés par Schiele ne font pas l’unanimité. Il dessine régulièrement des jeunes filles sous des caractères érotiques. En 1912, il s’agit de Tatjana von Mossig, fille d’un officier de marine qu’il dépeint. Ce dernier porte plainte et mène Egon au tribunal. L’artiste est finalement acquitté d’une partie des charges. Il est prouvé par témoignage et avis médical qu’aucun viol n’a été commis. Cependant, il est tout de même poursuivi pour atteinte à la pudeur et la morale.  

Egon Schiele, Fille nue avec les bras tendus, 1911, aquarelle, gouache et crayon sur papier, Madrid, Museo Nacional Thyssen-Bornemisza
Egon Schiele, Fille nue avec les bras tendus, 1911, aquarelle, gouache et crayon sur papier, Madrid, Museo Nacional Thyssen-Bornemisza

Jeunesse tourmentée  

Egon Schiele vint au monde dans une famille aisée mais torturée. Son père, chef de gare, destinait le jeune garçon à suivre cette même vois. Les quelques dessins d’Egon des rails donnèrent bon espoir à son père Adolf, mais il se rendit compte très vite des volontés de son fils de devenir artiste. Adolf déchira même quelques-uns de ses carnets de dessin. Syphilitique, Adolf était atteint de troubles psychologiques.

De plus plusieurs enfants de la famille sont morts en bas âge ce qui n’aidait pas Egon à évoluer dans la légèreté. Egon se retrouve orphelin de père à 15 ans et rapidement sous la tutelle de son oncle qui l’autorise à poursuivre son rêve. À seize ans, le futur artiste intègre l’Académie des Beaux-Arts où il étudie les arts classiques. Déjà désireux de quitter cet enseignement strict, la création d’une exposition d’art (Kunstschau) par Gustav Klimt décide l’étudiant à prendre son envol. 

Egon Schiele, Mère Morte I, 1910, huile et crayon sur bois, 32,1 x 25,7 cm, Vienne, Musée Léopold
Egon Schiele, Mère Morte I, 1910, huile et crayon sur bois, 32,1 x 25,7 cm, Vienne, Musée Léopold

L’élaboration d’une signature  

La jeunesse d’Egon Schiele lui forge un caractère provocateur et polémique. Il est en dehors de codes de l’époque et le revendique. La décision de l’artiste de rompre avec la tradition académicienne n’est pas novatrice à Vienne. En 1897, Gustav Klimt (1862-1918) et un groupe d’artistes fondent la Sécession viennoise.  

Egon Schiele, Le Cardinal et le Nonne, 1912, huile sur toile, 70 x 80,5 cm, Vienne, musée Leopold
Egon Schiele, Le Cardinal et le Nonne, 1912, huile sur toile, 70 x 80,5 cm, Vienne, musée Leopold

Cette œuvre est inspirée du Baiser de son mentor Gustav Klimt.   

Gustav Klimt, Le Baiser (Der Kuss), 1907-1908, huile sur toileavec feuilles d’or, d’argent et de platine, 180 x 180 cm, Vienne, Österreichische Galerie Belvédère
Gustav Klimt, Le Baiser (Der Kuss), 1907-1908, huile sur toileavec feuilles d’or, d’argent et de platine, 180 x 180 cm, Vienne, Österreichische Galerie Belvédère

Dans cette même veine, Schiele crée le Groupe pour le Nouvel Art (Seukunstgruppe) en 1909 et adhère au groupe “Sema” de Munich.  

Ainsi, le style de l’artiste se caractérise par un cerne noir pour délimiter les formes, des traits énergiques et saillants. Pour ses dessins de portraits, ce qui représente la majeure partie de son travail. Il réalise également quelques paysages et natures mortes.  

Egon Schiele, Krumau sur la Vltava (La Petite Ville IV), 1914, huile et pierre noire sur toile, 99,5 x 120,5 cm, Vienne, musée Leopold
Egon Schiele, Krumau sur la Vltava (La Petite Ville IV), 1914, huile et pierre noire sur toile, 99,5 x 120,5 cm, Vienne, musée Leopold

Egon Schiele, Soleil d’Automne, 1914, huile sur toile, Christie’s Londres
Egon Schiele, Soleil d’Automne, 1914, huile sur toile, Christie’s Londres

Le premier modèle à poser pour lui est sa sœur cadette. Elle pose vêtue et dévêtue comme la plupart des personnes qu’il représente.  

Egon Schiele, Portrait de Gerti Schiele, 1909, huile et peinture metallique sur toile, 139,5 x 140,5 cm, New York, Moma
Egon Schiele, Portrait de Gerti Schiele, 1909, huile et peinture metallique sur toile, 139,5 x 140,5 cm, New York, Moma

Concernant le traitement des visages en dessin, l’artiste délimite la forme à l’aide d’un crayon ou de fusain. Des touches d’aquarelle viennent réhausser le tout. Le teint du visage reste généralement pâle.  

Egon Schiele, Wally en robe rouge avec les genoux relevés, 1913, mine de plomb, aquarelle et gouache, 31,8 x 48 cm, collection particulière
Egon Schiele, Wally en robe rouge avec les genoux relevés, 1913, mine de plomb, aquarelle et gouache, 31,8 x 48 cm, collection particulière

Le rendu anatomique est parfois assez morbide. Il exécute des corps démembrés, dans une tension extrême, dans une schématisation géométrique exacerbée laissant apparaître l’ossature. Les représentations érotiques sont de mise dans son répertoire artistique.  

Egon Schiele, Nu masculin assis (Autoportrait), 1910, huile sur toile, 150 x 152,5 cm, Vienne, Musée Leopold
Egon Schiele, Nu masculin assis (Autoportrait), 1910, huile sur toile, 150 x 152,5 cm, Vienne, Musée Leopold

L’objectif premier de Schiele est de transmettre la détresse, la fragilité de ses modèles et leur condition psychique. À commencer par la sienne avec ses multiples autoportraits.  

Egon Schiele, Les Ermites (Die Eremiten), 1912, huile sur toile, 181 x 181 cm, Vienne, musée Leopold
Egon Schiele, Les Ermites (Die Eremiten), 1912, huile sur toile, 181 x 181 cm, Vienne, musée Leopold

Apaisement éternel 

Egon Schiele se marie avec Edith Harms en 1915. Là où son séjour en prison avait accru la violence dans les expressions de ses personnages, son union avec Edith adouci son œuvre. Les concours sont plus souples, délimités par des courbes, les expressions plus douces dans un univers plus coloré.  

Egon Schiele, La Famille, 1918, huile sur toile, 152,5 x 162,5 cm, Vienne, Palais du Belvédère
Egon Schiele, La Famille, 1918, huile sur toile, 152,5 x 162,5 cm, Vienne, Palais du Belvédère

Egon Schiele, L’Étreinte (couple d’amoureux II), 1917, huile sur toile, 98 x 169 cm, Vienne, Palais du Belvédère
Egon Schiele, L’Étreinte (couple d’amoureux II), 1917, huile sur toile, 98 x 169 cm, Vienne, Palais du Belvédère

Egon Schiele, Gustav Klimt, Edith Schiele et le bébé qu’elle porte décèdent la même année, en 1918 de la grippe espagnole.  

En 10 ans de carrière, l’artiste a exécuté non loin de 3000 dessins et 300 huiles sur toiles qui témoigne de sa courte existence. 

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